samedi 2 juin 2018

Chaussée solaire et véhicules électriques à la mairie

J’avais pour mission comme parfois, de représenter JC Boulard à des manifestations en Pays du Mans et me préparais à le faire pour aujourd’hui, lorsque j’ai appris la triste nouvelle de son décès. C’est donc dans la peine que j'ai du me résoudre ce matin à ne pas représenter JC Boulard qui était le président de notre syndicat mixte du Pays et du Pôle métropolitain. Mais l’ai je jamais représenté ? Je me souviens au début du mandat d’avoir un jour expliqué à Mme La préfète de l’époque que pour l’inauguration de l’exposition du « climat vu de ma fenêtre » et de la projection en avant première du film Demain au Quinconce des Jacobins, que « je représentais » JC Boulard, et elle avait esquissé un air dubitatif et amusé qui en disait long sur le personnage haut en couleur que même l’Etat ne contrôlait pas. Drôle de situation pour nous ce matin, car sans JC Boulard et son volontarisme visionnaire, nous ne serions sans doute pas ici pour inaugurer des projets innovants qui ont été appuyés par la dynamique du Pays, nous n’aurions pas d’exposition médiatique pour nos Wattway et Mouv’NGO, et, en même temps, bien que parti, notre président nous fait placer au second rang de l’actualité locale ce matin, et c’est bien normal. Alors après ce bref hommage, tentons de vous convaincre que notre contribution à l’actualité est méritée et que nous sommes sur une bonne voie pour un avenir apaisé.
 
En effet, nous avons devant nous un défi, qu’il faudra réussir malgré les difficultés qui se dresseront sur notre route. C’est à l’occasion de la COP 21 que beaucoup de français ont pris pleinement conscience de l’accélération de l’ampleur du défi climatique. L’Accord de Paris est un traité international qui encadre les efforts d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre à partir de 2020. Les travaux de cette COP21 s’étaient appuyés sur des quantités de données que des scientifiques du monde entier produisent depuis des décennies, des analyses et des projections du climat de demain, à travers notamment les travaux du Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat). Un consensus rassemble ces chercheurs : si nos émissions de gaz à effet de serre ne diminuent pas très rapidement, les conséquences pour les écosystèmes et les êtres vivants seront irréversibles et dramatiques, et l’on ne parle même pas des orages et tempêtes de plus en plus fréquents et violents.
Par conséquent, l’objectif est clair : limiter le réchauffement climatique mondial à 2°C d’ici 2100.
Il est important de rappeler que cette COP21, malgré son succès, n’était pas un aboutissement mais seulement une étape pour une mobilisation plus large à l’échelle mondiale pour défendre la justice climatique, celle qui prend en compte à la fois la défense des droits de l’Homme et celle de l’avenir de la planète.
Paradoxalement, la prise de conscience de cette urgence s’avère trop lente. En cause ? La remise en question de nos modes de vie, la complexité de la science climatique et son abstraction, les thèses avancées par les « climato sceptiques »...
Alors, que faire à notre niveau ? Nous avons entre nos mains une bonne partie des solutions mais encore faut-il passer à l’acte et nous organiser…
Pour le territoire du Pays du Mans, le précédent mandat (2008 à 2014) avait permis de prendre un virage important sur le plan énergétique et environnemental, au travers de 2 outils approuvés par les élus du territoire le 29 janvier 2014 :
- Le premier est le Schéma de Cohérence Territorial, plus communément appelé SCoT, un outil de planification urbaine pour les 20 prochaines années au sein duquel sont pris en compte les facteurs environnementaux et énergétiques d’une manière prégnante.
- Le second, élaboré en parallèle et en toute complémentarité, est le Plan Climat Energie Territorial (PCET) du Pays du Mans
En 2018, nous sommes donc dans la phase de mise en œuvre de ces deux outils, et déjà nous devons les renforcer : d’une part le SCOT est soumis  déjà à une obligation de tirer un premier bilan d’ici à 2020, d’autre part, le PCET doit se transformer en PCAET le Plan Climat Air Energie Territorial.
 
La commune d’Ecommoy poursuit sa transition énergétique avec sa dernière initiative le Wattway la route solaire qui produit de l’électricité qui vient à point nommé alimenter une utilisation de plus en plus grande d’électricité. Nous avions précédemment acquis une machine aspirateur de déchets urbains, et il y a quelques mois un véhicule de propreté, tout cela en électrique, dont nous sommes très satisfaits. D’un autre côté, nous avons réduit fortement nos consommations d’électricités grâce à la forte limitation et à la rénovation de l’éclairage public, un changement de politique spectaculaire qui nous a valu l’obtention du label village étoilé, avec deux puis une troisième étoile cette année. Nous avons pu aussi supprimer les convecteurs électriques de la mairie. Car, après avoir mené en 2016 une opération de rénovation énergétique de la mairie et de la mairie annexe comprenant l’installation d’une chaufferie bois, c’est la réalisation début 2018 de 48m² de Wattway alimentant la mairie et la borne de recharge électrique pour les autos de Mouv’nGo, véhicules en autopartage, qui valent à la ville l’exposition médiatique pour une matinée d’inauguration et de sensibilisation à la transition énergétique.

Mouv’NGO, véhicules électriques en autopartage fonctionne à présent depuis trois mois. Le bilan est extrêmement positif, avec en moyenne une auto louée chaque jour. Nous y avons souscrit parce que nous avons eu la certitude que cela correspondait à un besoin différent du transport collectif, à un besoin complémentaire des services privés disponibles. C’est un service public nouveau que les habitants de la région vont utiliser de plus en plus. Ce n’est certes pas la solution à tous nos problèmes, car il ne faudrait pas que tout le monde soit convaincu de passer demain à la voiture électrique. Ces véhicules en effet obligent pour l’instant à piocher dans les terres rares en Afrique, et en fin de compte elles causent aussi une pollution. Avantage, l’absence de bruits, la qualité de l’air, et surtout le partage, la mutualisation des coûts, la socialisation. L’outil de réservation proposé par l’opérateur Internet CLEMMOBI permet la mise en relation de chauffeurs et de passagers !
 
Wattway est une innovation française brevetée au terme de 5 années de recherche menées par Colas, un leader mondial des infrastructures de transport, et l’INES, Institut National de l’Energie Solaire. En associant les techniques de la construction routière avec celles de la production photovoltaïque, la chaussée Wattway fournit de l’électricité, énergie propre et renouvelable, tout en permettant la circulation de tout type de véhicules (poids lourds).
Wattway est une technologie de conception et de fabrication française. Les dalles Wattway sont fabriquées non loin de la Sarthe, par SNA, SCOP (Société Coopérative et Participative) basée à Tourouvre-au-Perche dans l’Orne. La coopérative ouvrière, est une rescapée de la fabrication française de panneaux photovoltaïques et de CD.
Doter une route de panneaux solaires n'est pas une idée neuve : la société américaine Solar Roadways a lancé le concept il y a plus de dix ans. Des expérimentations ont également été lancées aux Pays-Bas et en Allemagne. Mais le tronçon de Tourouvre-au-Perche fut une première mondiale par sa taille et il a fait de  la France la pionnière en la matière. Mais, aussitôt, les critiques ont fusé. Trop cher et pas assez performant, ont affirmé ses détracteurs. Une levée de boucliers qui n'a pas étonné Daniel Lincot, directeur de recherche au CNRS et spécialiste du photovoltaïque. « Il est très classique en France de déconsidérer les innovations. Pour ma part, je suis ravi qu'une nouvelle technologie soit développée en France et non en Californie. Cette fois, nous avons pris un temps d'avance sur la concurrence. »
Pour le démontrer, Colas a souhaité tester également le concept sur de petites surfaces (50 à 100 mètres carrés). Douze sites en France métropolitaine dans un premier temps, un à La Réunion, un en Amérique du Nord et un au Japon, où une portion de route a été inaugurée au pied d'un immeuble du centre-ville de Tokyo.  En France, un supermarché Lidl de Moult en Normandie a ainsi déjà déployé une expérimentation similaire.
Le monde va se transformer rapidement. Déjà la Chine tente de nous damer le pion. Pour ce qui est des routes du futur, la Chine dépasse désormais la France. À environ 400 kilomètres de Pékin, dans la province du Shandong, les automobilistes roulent depuis janvier 2018 sur une portion d'autoroute de 2 kms équipée de dalles photovoltaiques.
Le concurrent chinois, Qilu Transportation Development Group assure, qu'à terme, cette autoroute solaire permettra également de recharger par induction les véhicules électriques ou de déneiger la chaussée.
Les français poursuivent la R & D pour améliorer les performances.  Colas travaille sur trois sujets : la robustesse des dalles, la facilité d'installation des câbles et l'architecture électrique.
Pour cela, la société doit aussi gagner la bataille des coûts. « Notre objectif n'est pas de concurrencer les tarifs des fermes solaires, mais ceux des panneaux en toiture, poursuit-il. L'avantage de Wattway est de ne pas occuper d'espace supplémentaire, de s'intégrer au paysage et de résister aux intempéries. La route solaire prend tout son sens dans les territoires contraints comme les îles ou les lieux avec des contraintes architecturales, comme des monuments classés. »
Sensible à la transition environnementale en tant que Vice-Président du Pays du Mans
le maire d’Ecommoy que je suis, par ailleurs en charge de la transition énergétique et environnementale au sein de ce syndicat mixte, a tout de suite cru à l’idée pour la commune. En effet, l’équipe municipale souhaite depuis plusieurs années mener des projets de photovoltaique, mais les batiments municipaux ne sont pas toujours adaptés pour un rendement optimal, et les couts sont importants lorsqu’il faut par exemple désamianter une toiture avant pose. Surtout, la ville comporte deux périmètres classés monuments historiques depuis quelques années, et le photovoltaique ne peut guère équiper les toitures municipales en centre ville.
Or finalement, l’esthétique de la ville s’est révêlé être un défi qui a motivé plus qu’il n’a freiné. Par exemple, le projet de rénovation énergétique avec installation d’une chaufferie à bois a été très bien financé par l’Etat et la Région, parce qu’il permettait de démontrer que c’était faisable à l’intérieur d’une mairie ancienne en périmètre classé, sans toucher à l’aspect extérieur.
Et puisque la commune s’est inscrite par ailleurs tout de suite dans la mise en place du Mouv’nGo, nous avons saisi l’opportunité de proposer à l’Etat de financer l’expérimentation Wattway dans le même projet que l’installation de la station d’autopartage. Quant aux sanisettes, et la voirie neuve, elles étaient déjà envisagées et se sont trouvées dans l’emprise du projet en autofinancement complet.
Pour touts ces opérations, il a fallu coordonner le réaménagement de la place du Général de Gaulle sur laquelle est située la mairie, la reprise de canalisations découvertes défectueuses, le creusement d’une tranchée entre la mairie et l’armoire électrique Wattway ainsi que le réseau vers la borne de recharge rapide. Le revêtement de la place a été refait à neuf avec une partie particulièrement dense pour accueillir les 48m² de Wattway.
Au total, la commune vient d’investir 239 754 Euros TTC au pied de sa mairie, en faisant une très bonne opération.
- Réfection de la Place : 23 000 € TTC (compris modification du stationnement, renforcement structure de chaussée, marquage au sol, tranchées et canalisations d’eaux pluviales)
- Dalles Wattway : 126 720 TTC
- Toilettes : 45 480 € TTC
- Tranchées, canalisations électriques : 3 000 € TTC
- Station d’autopartage  : Borne 8 744 € TTC + Marquage au sol 2 065 € + paramétrage plateforme d’autopartage 1 800 €
- Véhicules : 28 357 € TTC + géolocalisation 588 €
Participation de l’Etat : DETR : 76 367 € + DSIL :   57 660 €
Pour être complet, nous devons dire que le Pôle Métropolitain a reçu une aide de la Région des pays de la Loire et de l'ADEME pour l’achat et le fonctionnement de la plate-forme de réservation qui est entièrement supportée par le syndicat. Pour être encore plus complet, on dira que le CD72 a refusé de nous accorder une subvention de 1800 euros pour la borne de recharge, confirmant que cette entité a définitivement raté ce train là.
La place du Général de Gaulle devait de toute façon être refaite prochainement. Le Mouv’nGO a bénéficié d’un phénomène d’achats groupés avec les cinq autres communes sarthoises pionnières (Guécélard, Brette-les-Pins, Ballon-St-Mars, Etival-les-LeMans, Connerré) et d’incitations à la mobilité électrique (primes). Le service peut s’équilibrer financièrement si les locations sont continuelles, mais en tout état de cause, même sans locations, les véhicules remplacent pour les agents d’anciens véhicules de service polluants. Nous avons donc a Ecommoy toute raison de ne pas nous plaindre de la gouvernance au dessus de nous.
Quoiqu’on en dise du sort que l’Etat fait depuis dix ans aux collectivités locales en réduisant les robinets d’argent public, c’est grâce à l’Etat si la nation française se transforme dans ses territoires. L’Etat qui a soutenu Wattway et lui a donné une médiatisation bienvenue à l’occasion de la COP21 à Paris en 2015. L’Etat qui a labellisé des centaines de territoires à énergie positive pour la croissance verte TEPCV, l’Etat en Sarthe et en particulier la DDT qui a compris le sérieux de nos intentions (réunions avec M. Dufumier). J’oserais avouer que l’accompagnement financier de l’Etat a été le déclencheur du vote des élus municipaux, pour certains plus que sceptiques, malgré les chiffres avancés concernant les économies de fonctionnement effectuées à terme, long, renvoyée sur le bâtiment de la mairie, l’électricité produite est consommée localement sans stockage.  La puissance maximale théorique de l’installation est de 3650 kWh/an, soit environ 30% des besoins de la mairie avec sa borne de recharge rapide. Voilà qui devrait canaliser l’électricité dans notre commune, plutôt que de flotter en l'air, je préfère qu'elle soit dans le sol.

 

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