jeudi 16 novembre 2017

Le club de tir perd son procès contre la ville

Par un jugement rendu le 16 novembre, le Tribunal administratif de Nantes a estimé que les limitations sonores imposées au Club de tir sportif du Maine (CTSM) depuis 2015 par arrêté municipal étaient parfaitement légitimes étant donné que les bruits avaient été mesurés conformément aux règles en la matière. Il donne raison aux riverains qui ont considéré que les arrêtés étaient trop favorables au club en leur permettant encore une séance par mois de tirs de contrôle. Selon le raisonnement des juges, dès lors que les tirs sont bruyants, le trouble est constant, c'est au club de faire les travaux nécessaires. En réalité, il y a deux jugements rendus le même jour dans notre affaire. Le premier écarte rapidement les sottises présentées par le CTSM pour contester le principe même d'arrêtés municipaux restrictifs. Le second jugement donne raison aux riverains. Finalement, le CTSM est débouté de toutes ses prétentions et se trouve en plus mauvaise posture que s’il avait fait profil bas au lieu d’adopter l’attitude qui a été la sienne depuis plus de deux ans.


De quelle attitude parlons-nous ? Face à un arrêté qui lui permettait encore les tirs de contrôle, des compétitions, et lui imposait seulement le respect des lois en matière de bruit, le CTSM a réclamé plus de 40 000 euros de dommages et intérêts à la commune pour l’indemniser du temps passé en « tracasseries » depuis les arrêtés municipaux ! La moindre réunion, le moindre déplacement à la mairie pour prendre renseignement, le fait même d'évoquer le sujet en assemblée générale du club, a été comptabilisé pour demander une indemnisation à la justice. Quelle belle mentalité, demander presque l'équivalent de 10 euros par habitant de la commune afin de pouvoir continuer à ennuyer paisiblement les quartiers avoisinants... En réalité, il s'agissait d'une stupide tentative d'intimidation, comme il y en a eu dans des courriers ou des articles. Un courrier m'a menacé ouvertement par l'intermédiaire d'un avocat de poursuite pour diffamation, un autre m'a demandé de sévir contre le gérant du camping pour les propos qu'il tenait, enfin dans un article de début de bilan de saison 2016  le président du club se félicitait que l'affaire médiatisée ait fait de la PUB au club et ait motivé les adhésions...

Depuis qu'il a changé de dirigeants, le club confronté au conflit avec les riverains et la mairie, a eu une attitude bravache et péremptoire, jusqu'à devenir outrageante à l'égard de la commune. J'ai attendu le jugement pour le dire publiquement. Cette attitude est le fait d'une ou de deux personnes, ce qui a conduit la défense du club, dans le mur... Extraits des écrits échangés pendant la procédure :


Le Club a prétendu que depuis ses décisions internes en date de juin 2015, il n’y avait plus de troubles puisque « rien ne démontre le contraire », que depuis juillet 2015 aucune mesure n’a été réalisée. Ceci est faux. Car s’il est vrai que aucune nouvelle étude n’a été réalisée par un professionnel, il est notoire que le voisin gérant du camping s’est doté d’un appareil de mesure et qu’il en a pratiqué de nombreuses au cours de l’année 2015 et 2016, comme le montre les réclamations qu’il a adressé au policier municipal et au maire faisant état de niveaux de bruit mesurés. En outre, si la mairie n’a pas commandé de nouvelles études plus récentes, c’est parce que le CTSM avait promis qu’il ferait le nécessaire en se rapprochant du laboratoire d’acoustique de l’Université du Maine ou bien en faisant appel à la société Ouest acoustique qui a réalisé l’étude du 26 mai 2015. Le CTSM n’a pas tenu son engagement. Il semblerait que Ouest acoustique n'ait pas souhaité travailler pour le club... Pas étonnant vu comment son gérant a été pris pour un guignol lorsqu'il a présenté l'étude commandée par la commune... En définitive, le club a préféré utiliser son argent à commander un rapport inutile s’efforçant de démontrer que les mesures du 26 mai 2015 n’étaient pas conformes à la norme FDS31-160. Le Tribunal valide pourtant les études communales.


En fait, les nombreuses réclamations reçues en mairie en 2015 et en 2016, ainsi que le recours des riverains contre les arrêtés municipaux jugés trop permissifs prouvent bien que les troubles n’ont pas cessé, car c’est bien structurellement que les installations du CTSM ne peuvent convenir aux activités les plus bruyantes qu’elles hébergent, même seulement certains jours du mois. Le CTSM a prétendu que rien n’établissait le non respect des normes, mais il n'a produit en justice aucune étude indépendante sérieuse qui le démontre. Pourtant, il n'a pas hésité à demander à la commune le paiement d'une somme de 1600 euros pour facture de contre-étude alors qu'il n'a pas été capable de produire ladite contre-étude devant le tribunal.
Le club a reproché l'imprécision des arrêtés, me prenant pour un amateur. Il n’était pas nécessaire dans l’arrêté d’exprimer les interdictions très précisément en décibels, car le trouble à l’ordre public est fonction du ressenti des administrés, sous la réserve de l’appréciation qui en est fait par l’autorité de police de ce qui est acceptable ou pas. Le Club a été dans la caricature, prétendant être victime d'une interdiction totale, alors qu’il n’y a qu’une restriction des horaires et des jours.
Le CTSM a comparé les bruits détonants des armes à feu, caractéristique particulièrement pénible à l’oreille humaine (bruits impulsionnels), à ceux des enfants et des sportifs qui jouent, ou au bruit des marcheurs en forêt, faisant régulièrement état de ce que les footballeurs riverains étaient tout aussi bruyants ... Il a donc prétendu être victime de discrimination dans le « droit à faire du bruit ». Mais si ces types de bruits par armes sont à ce point anodins, on se demande bien pourquoi il existe une norme de mesure acoustique aussi spécifique, si spécifique que le CTSM l’invoque à longueur de littérature pour dire que l’on ne mesure pas correctement son bruit.

Etre de mauvaise foi dans une plaidoirie, c'est un peu le jeu, mais quand on écrit, en parlant du maire : "A en suivre le raisonnement de Monsieur le Maire, on peut se demander si en plus du problème de fond, il n'y a pas un problème de forme et de compréhension lexicale alimentant polémique et désordre",  on passe de l'intimidation à l'insulte. Non content de n'avoir rien compris à mes arguments juridiques, le club n'a eu de cesse de s'enfoncer dans une défense idiote et lourde de conséquences pour son avenir. Il a donc doublement perdu, car il a perdu son procès et il a perdu son âme.
Sébastien Gouhier
Docteur en droit public
Maître de conférences université du Mans
Maire d'Ecommoy.

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