mardi 18 mai 2010

La déontologie de la police, bientôt du passé

Le recul de la protection des personnes face aux abus policiers est-il consommé ? C'est un fait, si l'on focalise un instant sur une réforme qui provoque en ce moment la disparition de la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS), équivalent de la CNIL pour la dénonciation des abus commis par les forces de sécurité.
Autant le respect de la loi et de l'autorité me paraissent un fondement inconstestable de la société, et l'on peut me traiter parfois de "légaliste", autant je suis intraitable à l'égard de ceux qui portent l'uniforme mais ne l'honorent pas par leur comportement. J'ai malheureusement été conduit à faire rappel dans ma propre commune de l'article 6 du code de déontologie: "L'agent de police municipale est intègre, impartial et loyal envers les institutions républicaines. Il ne se départit de sa dignité en aucune circonstance.
...Il a le respect absolu des personnes, quelles que soient leur nationalité ou leur origine, leur condition sociale ou leurs convictions politiques, religieuses ou philosophiques."
La tolérance zéro doit s'appliquer en premier lieu à ceux qui sont chargés de la faire appliquer. Et puisque l'on a beaucoup parlé de "l'identité nationale", on aurait bien fait de rappeler que ce sont les français qui ont forgé le concept moderne de puissance publique à partir du XVème siècle, permettant la prise de conscience de l'Etat dans les esprits par le respect de l'uniforme.
Le jour où l'uniforme n'est plus honorable, l'Etat disparaît. J'ai souvent travaillé cette réflexion et me suis intéressé à la déontologie dans la fonction publique, en particulier concernant les forces de sécurité. Il y a quelques années, j'avais publié un article dans la Revue française de droit administratif pour attirer l'attention sur la création de la CNDS, qui aurait pu connaître le même destin prestigieux que la CNIL, surtout dans un contexte ultra-tendu de prétentions sécuritaires tel que nous connaissons depuis quelques années (La déontologie de la sécurité sous surveillance d'une autorité administrative indépendante : une loi pour rassurer les citoyens ?, RFDA 2002, n°2, pp.384-392).
Mais, bien que très sollicitée, la CNDS remet probablement son dernier rapport annuel. Elle est en effet condamnée à disparaître au profit d’un Défenseur des droits, une nouvelle entité inscrite dans la Constitution et déjà largement critiquée. Le projet de loi, qui doit être débattu au Sénat avant l’été, sera loin de présenter les mêmes garanties de contrôle. Le périmètre des compétences du Défenseur des droits est considérablement réduit. Davantage tourné vers la médiation que l’enquête, il pourrait se voir refuser par les autorités mises en cause «toute investigation pour des motifs de sécurité publique ou des circonstances exceptionnelles». Une définition assez floue pour bloquer toute enquête.

Roger Beauvois, président de la CNDS explique: la Commission a souvent gêné depuis sa création en 2001. Aurait-elle pêché par excès de zèle ? «Les réactions face à notre travail ont toujours été virulentes», assure, amer, Roger Beauvois. Les saisines, elles, ont augmenté de 50% l'an passé.

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