samedi 1 septembre 2018

Pas d'inquiétude pour Moncé-en-Belin dans l'Orée de Bercé... pour l'instant.

Depuis plus de six mois, la Communauté de communes Orée de Bercé Belinois est sous pression, depuis que le représentant de la commune de Moncé a fait paraître dans la presse que son conseil municipal étudiait les avantages d'un transfèrement pour entrer dans le Mans-Métropole. Bien entendu, l'enjeu est considérable pour la CCOBB qui depuis quelques années se trouve devenue une des plus petites communauté du département de la Sarthe, et qui pourrait passer de 8 à 7 communes en perdant sa deuxième commune la plus importante en nombre d'habitants et d'entreprises. Certes, cela ne la ferait pas tomber sous le seuil minimum légal des 15000 habitants, et donc en théorie, la possibilité d'un départ de Moncé existe. Mais, il n'y a pas vraiment lieu de s'inquiéter pour au moins deux raisons.


L'information essentielle à connaître à ce sujet, c'est qu'un tel projet prend du temps et que du temps, Moncé n'en n'a pas beaucoup. Peut-être devra-t-il attendre un prochain train, un jour que l'on espère lointain...
Bien sûr, quand il y a accord de toutes les parties, Communauté d'origine, Communauté d'accueil et préfecture, cela peut aller vite. Mais, une telle entente est impossible au cas présent, car pour la CCOBB ce serait se couper un bras. D'ailleurs, s'il n'y a rien qui semble évoluer depuis le début de l'année, c'est bien qu'il n'y pas d'entente.
Alors voilà, maintenant, il faut savoir que le droit français interdit un changement d'adhésion communautaire à moins d'un an du renouvelement des assemblées, et que les changements se font aux années civiles. Il faudrait que l'entrée de Moncé dans LMM ait été programmée pour prendre effet le 1er janvier 2019 pour que cela soit compatible avec les élections municipales de début 2020. Or, techniquement, une entrée dans une Cdc demande au minimum six mois de préparation (problème des récupérations puis transferts de compétences). Cette règle a pour légitime objectif de ne pas faire ce genre de démarche dans le dos des électeurs. Si Moncé souhaitait un départ prochain, il serait préférable que cela soit discuté dans le débat des prochaines élections en 2020, pour une réalisation au plus tôt en 2022.

La seconde raison pour laquelle il me semble que cela ne pourra pas se faire, même si le temps ne manquait pas, c'est que la Préfecture n'y sera pas favorable.

Puisqu'il y a des intérêts divergents, c'est en effet le Préfet qui a pouvoir d'autoriser ou non. Or, on voit bien avec l'exemple du Grand-Lucé qui se bat pour essayer d'entrer dans la Cdc du Sud-Est du Pays Manceau, quelle est la doctrine de la préfecture. La carte des intercommunalités ayant été adoptée de façon récente (entre 2016 et 2018), il n'y aura plus de changements qui ne correspondent aussi aux intérêts de l'Etat français. Et cet intérêt est le suivant : depuis la loi RCT de 2010, la France n'a pu parvenir qu'à une réduction très modeste du nombre de ses communes puisque par la fameuse technique des "communes nouvelles", elle est passée de 36680 à 35 500 communes environ. Or, la Sarthe est loin de faire partie des bons élèves dans ce domaine.
Il se trouve que la création d'une commune nouvelle réalisant la fusion de communes n'appartenant pas à la même communauté, donne le droit à la nouvelle commune de choisir une communauté de rattachement sans que le préfet puisse s'y opposer. Voilà pourquoi le préfet oppose aux communes sarthoises une fin de non-recevoir lorsqu'elles veulent changer de Cdc, en leur disant que ce serait différent s'il y avait création d'une commune nouvelle. En clair, il y a une forte incitation à y travailler, un chantage diront certains.
Pour Moncé-en-Belin, la situation n'est pas si tranchée, parce que la création d'une commune nouvelle avec une entité déjà présente dans le Mans Métropole, Arnage par exemple, serait certes une technique imparable, mais cela n'aurait rien de "naturelle" ou d'"évident". Je veux dire par là, que Moncé pourrait par son seul bloc assez conséquent intégrer LMM, comme les mulsannais le firent en leur temps pour partir du Sud-Est du Pays Manceau. Mais l'Etat, je le pronostique, n'accepterait pas pour Moncé, ce qui s'est fait il y a longtemps pour Mulsanne, sans qu'il y ait une réflexion plus large sur le sud du Mans, parce que désormais les Cdc doivent avoir des tailles importantes pour assumer toutes les nouvelles compétences qui leur ont été destinées depuis 2010, la CCOBB ne serait plus viable en l'état.
C'est donc un ensemble de questions vraiment politiques qui se posent, aux électeurs de Moncé en premier lieu. Seraient-ils prêts à programmer la disparition de leur commune absorbée par Arnage ? Etre au final englobé dans Le Mans ? Et en fin de compte pour quelles raisons ? Ils sont peut-être d'autant surpris que la question ne semble pas avoir été favorable à l'ancien maire de Moncé battu en 2014 pour différentes raisons, dont sans doute d'avoir voulu pendant un temps faire mine de vouloir que Moncé entre dans LMM. De la même façon et la même année, les élections furent franchement mortifères pour l'ancien maire de Teloché qui voulait faire aussi entrer sa commune dans LMM.

Alors, quelle serait la motivation, la justification, donnant cette irrépressible envie d'entrer dans LMM malgré les risques ? Cette fois, c'est le projet de halte ferroviaire pour le TER à Moncé qui semble déterminant. Chacun a pu lire depuis un moment des informations sur l'envolée du coût estimé pour cette gare, soit 7,7 Millions d'euros... La commune de Moncé obtiendrait des financements à hauteur de 50%, mais il lui resterait 2,700 M euros à autofinancer. Et puisque la CUM du Mans Métropole détient l'exclusivité de la compétence "transports en commun" pour ses communes membres, une entrée garantirait que Moncé ne paye plus elle-même sa gare mais plutôt LMM. Voilà un scénario idyllique pour qui voudrait justifier une entrée dans LMM au motif de la gare, mais on ne sait jamais ce que les élus de LMM diraient dans les négociations. Par exemple Moncé entrant avec un investissement de 2,700 Millions à lui financer, alors elle passera en fin de file d'attente pour autre chose, et passera son tour lorsqu'il y aura des investissements de la métropole pendant un bon moment ?
Les Moncéens ne se décideront pas sans avoir en main des chiffres, certainement très nombreux, puisqu'un bureau de conseils (KPMG) a réalisé une étude financière sur le sujet, étude dont je ne dispose pas. Ce que je sais, c'est que les études n'envisagent pas tous les aspects du problème et ne prennent pas en compte ce qui peut évoluer. Le Gouvernement actuel a pourtant bien prévu une remise à plat de la fiscalité locale d'ici la fin du quinquennat... En outre, lorsque l'on présente des raisonnements rassurants sur le moyen terme, que l'on annonce par exemple que des augmentations d'impôts sont lissées et neutralisées pour les contribuables, il me semble certain que cela ne dure pas un si grand nombre d'années. Par ailleurs, il y a quelques années, j'avais déjà écrit pour Moncé que l'entrée dans une Communauté très urbaine pouvait impacter le calcul de la richesse de la commune, calcul servant ensuite aux dotations de fonctionnement de l'Etat. Par exemple, rien que pour le Fond de péréquation intercommunal et communal (FPIC), il m'apparaissait que la commune deviendrait contributrice alors qu'elle perçoit ce fond depuis sa création... Quel que soit le bilan des chiffres, faut-il se lancer dans une décision pour des raisons financières si ces raisons ne sont valables que quelques années ?
Si l'on focalise sur le problème central tel qu'il est posé aujourd'hui par le représentant du conseil municipal de Moncé, la difficulté pour Moncé est le financement de la halte ferroviaire. La CCOBB a reçu une demande écrite de Moncé pour savoir si elle accepterait de financer la moitié du reste à charge de cette gare pour la commune, soit un fond de concours de la Communauté d'environ 1,350 Millions d'euros, sans quoi la CCOBB pourrait être déstabilisée. En clair, un départ de Moncé nous pendrait au nez.
La question posée interpelle les autres communes pour plusieurs raisons. Tout d'abord, comment la CCOBB pourrait-elle se lancer dans une telle contribution alors qu'elle peine déjà à équilibrer ses budgets et a mis en œuvre un plan d'économie qui réduit les prestations proposées à destination des familles ? La CCOBB devant par ailleurs assumer de nouvelles compétences qui impliqueront des investissements (assainissement), pourrait-t-elle financer des compétences qui appartiennent aux communes ? Après tout, il y a deux autres communes qui possèdent des gares sur le territoire et qui pourraient avoir aussi à réaliser des travaux d'aménagements dans leurs abords. Il y a certes peu de besoins sur celle de St-Gervais, mais à Ecommoy, il y a une gare importante qui est dangereuse et n'est pas accessible aux personnes à mobilité réduite. Comment pourrait-on expliquer aux électeurs des communes que la CCOBB finance une gare neuve à Moncé pour un trafic estimé à 160 voyageurs par jour, alors qu'une gare dangereuse ne serait pas aidée quand elle concerne 230 passagers/jour ? Et s'il fallait comparer l'ordre des priorités, on établirait que la gare d'Ecommoy sert au moins à 4 des 8 communes du territoire, tandis que la future gare de Moncé ne servira qu'aux habitants de Moncé étant donné la proximité immédiate d'une gare à St-Gervais et d'une gare à Arnage. Où serait la logique ? En clair, si la CCOBB intervient dans l'aménagement des gares, elle devra le faire pour toutes les communes en toute équité. En ce cas, la question de sa capacité financière à le faire est encore plus douteuse, sachant ce que couteraient des travaux indispensables à Ecommoy (il faudra peut-être un jour une passerelle, et les voitures SNCF ont des marches 40 à 80 cm plus hautes que le quai !).
Contrairement à d'autres, je n'irai pas jusqu'à dire que la gare de Moncé est la gare de trop, car je suis convaincu que c'est un élément d'avenir pour cette commune. Elle renforcera son attractivité qui est actuellement déjà très bonne. Mais alors, comment ne pas poser la question autrement ? Si cette gare vaut vraiment le coup, au seul profit de la commune, qui par son développement résidentiel voit sa richesse s'accroitre, pourquoi la commune de Moncé ne se résout-elle pas à l'idée que c'est à elle seule de financer la part communale du projet ? Est-ce au dessus de ses moyens ? Je ne crois pas, car la commune vient de facilement franchir le cap des 3500 habitants, elle va connaître le même phénomène que les autres de la première couronne mancelle. Peut-être que ça ne colle pas dans les prévisions parce que le cout du projet s'est envolé par rapport aux estimations initiales ? En ce cas, c'est aux habitants de Moncé d'avoir un vrai débat démocratique pour redéfinir des priorités. La gare, c'est peut-être un peu trop tôt ? Ou bien ce sont d'autres projets qui doivent attendre ? Il s'agit franchement d'un débat "Monço-Moncéen".
Plus j'y réfléchis, et plus je trouve illégitime que l'on demande aux élus de la CCOBB de se prononcer sur la question sous pression, car une peur évidente se présente à moi : il n'existe en surplus aucune garantie que faire un gros chèque à Moncé pour sa gare aujourd'hui empêche finalement cette commune d'entrer dans LeMansMétropole demain. On n'imagine pas que les mêmes élus qui auraient obtenu satisfaction enfonceraient une telle lame dans le dos de l'OBB, mais les élus, cela se renouvelle avec le temps.

Pensée pour les amis et la famille de Moncé-en-Belin
Sébastien Gouhier

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